Johnny Gagnon dit Le
Chat Noir, Black Cat
S'il est un joueur de hockey qui a continué la tradition des "Flying French
men", d'abord établie par les Laviolette, Lalonde, Berlinguette et autres, c'est
bien le légendaire Johnny Gagnon. Durant ses deux premières saisons avec le
Canadien, il a mérité le privilège de sillonner la glace en compagnie des célèbres
Aurèle Joliat et Howie Morenz pour former l'un des trios les plus explosifs de l'histoire
du Bleu blanc Rouge. Johnny Gagnon, c'était "un paquet de dynamite".
À l'automne 1932, ce trio fut brisé par l'entraîneur et, en 1934, Gagnon fut échangé
aux Bruins de Boston tandis que la grande vedette Howie Morenz prenait la direction de
Chicago.
En 1935, Gagnon fut heureusement ramené à Montréal où son coeur était resté, mais il
fallut attendre 1936 avant le retour du grand Morenz. Réunis à Joliat, comme au
début de la décennie, les trois vétérans, dont l'âge moyen était 33.7 ans, firent à
nouveau les délices des amateurs. C'est durant cette saison 1936-1937 que Johnny
Gagnon connut les meilleurs moments de sa carrière: ayant participé aux 48 joutes
régulières du calendrier, il se classait premier compteur de sa formation et sixième de
toute la ligue. Il avait marqué 20 buts et fourni 16 aides en plus d'avoir fouillé
dans les coins en faveur de ses coéquipiers; c'est pourquoi il fut alors proclamé le
joueur le plus utile à son équipe.
Johnny Gagnon est né dans une paroisse voisine de chicoutimi le 8 juin 1905. Dès
l'âge de quinze ans, il quittait la région pour rejoindre les Sons of Ireland, à
Québec et à Trois-Rivières. En 1926, Léo Dandurand lui fit signer son premier
contrat professionnel, mais il dut patienter encore quatre ans avant de pouvoir s'aligner
avec le Canadien. En 1926-1927, comme il le fera à nouveau dix ans plus tard, il
termine en tête des compteurs des Castors de Québec, ancêtre des As dans la Ligue
canado-américaine. Durant les trois hivers suivants, il s'aligne avec le Providence
et il devient, pour le reste de son existence, un citoyen de cette ville du Rhode
Island. Sa combativité et son ardeur pour foncer et aller batailler dans les angles
de patinoires lui valurent d'atteindre la "grande tente", en 1930. Avec
Joliat et Morenz, il connut des heures de gloire et, dès sa première saison, il
méritait l'honneur d'inscrire son nom sur la coupe Stanley.
Zotique Lespérance, chroniqueur sportif à La Patrie, prétendait que le sobriquet de
Black Cat était dû à l'effection de Gagnon pour les chats noirs, mais cette explication
n'est guère convaincante. La version de Charles Mayer est plus normale et
crédible: "On donnait à Johnny Gagnon le surnom de Black Cat parce que son
teint noir et ses yeux noirs le rendaient terrifiant, surtout qu'il jouait avec la
rondelle comme un chat avec une souris".
Son chandail, marqué du numéro 14, était le même qu'Armand Gaudreault et Georges
Hainsworth avaient endossé avant lui. Parmi de nombreux autres à sa suite, Elmer
Lach, Billy Reay, Claude Provost durant quinze ans et Mario Tremblay, le Bleuet bionique,
rendirent ce gilet historique.
De petite taille, Johnny Gagnon mesurait 5' et 5" et, durant son stage de dix ans
dans la Ligue nationale, son poids a varié de 140 à 155 livres. Comme ailier
droit, ayant participé à 444 joutes des calendriers réguliers, il a enfilé un grand
total de 120 buts et il a fourni 141 aides; il a passé 295 minutes au banc des punitions.
Dans les séries de huit fins de saisons, il a accumulé 23 points, 11 buts et 12
aides, tout en réchauffant le banc des punitions pendant 37 minutes.
En 1940, son contrat a été vendu aux Americans de New York et c'est avec ce club qu'il a
terminé la saison.
De 1940 à 1943, ayant retrouvé son statut amateur, il a évolué à Shawinigan, à
Saint-Jérôme et au Cap-Breton, cumulant les rôles de joueur et d'instructeur.
En 1943-1944, il devint dépisteur pour les Reds de Providence, fonction qu'il conserva 14
ans.
De 1957 jusqu'à son décès, il a été dépisteur pour les Rangers de New York,
concrétisant ainsi son vieux rêve de se réaliser dans le milieu du hockey.
En 1974, lorsque les autorités municipales de chicoutimi l'ont invité à l'inauguration
de l'amphithéâtre, "aréna de poche", auquel on donnait son nom, il a été
fort touché de cette attention à son égard, lui qui avait quitté la ville de son
enfance depuis si longtemps.
Il est décédé le mercredi 21 mars 1984 à l'âge de 78 ans et 9 mois, des suites d'un
cancer du foie. Il laissait son épouse Gertrude Mayer et deux de ses frères à
chicoutimi: Arthur Gagnon et Léon Gagnon, caporal de la Sûreté du Québec et qui
fit partie de l'équipe de hockey du camp militaire 55 de Rimouski en 1942.
La réputation de joueur étoile qu'a laissée Johnny Gagnon est encore présente chez les
générations actuelles; en dépit de sa petite taille, il était l'image de
l'agressivité, de l'acharnement et de la détermination.
Sources: Progrès-Dimanche, 22 septembre 1974, p. 134.
La
Presse, 23 mars 1984, p. 9.
Saguenay-Loisirs, novembre 1950.
Carte de hockey,
Série 1955-56.
Progrès-Dimanche, 25 mars 1984.
Archives de la ville de
Chicoutimi.
Le numéro 14, de Johnny Gagnon à Mario Tremblay(Progrès-Dimanche, 3 Juillet 1977)